Ambassade de la république du Niger au Mali
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En
posant cette interrogation grave, il nous plait de rappeler cette promesse cynique de la France qui, à ciel ouvert, annonçait qu’elle fera tout pour faire échouer la transition au Niger comme si elle souffrirait plus de perdre le Niger, devenu membre de l’AES et allié potentiel de la Russie d’un Poutine perçu comme la bête noire d’Emmanuel Macron et plus largement de l’Occident dans son ensemble. Les premiers mois de la transition menés dans la communion avec le peuple qui se mettait debout pour soutenir son intrusion sur la scène politique, annonçaient de beaux jours pour le pays auxquels tous les Nigériens avaient cru, se donnant sans compter à un CNSP qui venait sauver le pays. Dieu même était devenu complice car pendant des jours, à la suite du coup d’Etat, il a généreusement plu dans le pays si bien que pendant des jours, comme dirait Bernard Dadié, « le soleil se cachait de honte ».On avait cru que ce mariage de raison allait durer et se renforcer car les Nigériens avaient cru qu’un soldat, jamais, ne pouvait avoir de choix que son pays, les individus comptant peu surtout lorsqu’il y a à faire des choix complexes en des conjonctures historiques compliquées comme celles que l’on vit dans le pays. Bazoum et son clan ont beau dire que le coup d’Etat était une mise en scène orchestrée par son prédécesseur Issoufou engagé dans un agenda obscur, les Nigériens ivres de changement ne pouvaient rien entendre de ces annonces, faisant aveuglément confiance à une armée qui a juré de ne pas trahir les aspirations légitimes du peuple. Mais qui pouvait être le peuple pour ceux que la France, coléreuse, appelle avec mépris la « Junte » mais que nous autres appelons dans le pays des héros ?
Mais plus les mois passent, plus des signes apparaissent, faisant douter bien de Nigériens et depuis quelques temps, l’on a vu des acteurs s’agacer des tortures quelque peu tragiques que prend le cours de l’Histoire dans un pays encore inquiet face à l’avenir notamment lorsque les actes ne suivent toujours pas pour honorer les paroles, les discours. Mais c’est surtout la dernière manifestation de soutien manigancée à Niamey par certains hommes du CNSP sans qu’on ne sache trop les motivations profondes d’une telle action et d’une telle intrigue qui a eu le mérite de jeter le froid sur les relations entre le CNSP et les différentes organisations qui le soutenaient. Heureusement, très vite, la situation a été gérée et partout, l’on peut enfin apprendre de la part de toutes les organisations, que leur soutien reste actif et sincère, aujourd’hui et toujours. Mais faut-il pour autant se faire trop d’illusion à croire que pour autant, tous les doutes se seraient dissipés ? En vérité, le malaise reste profond et il y a bien à faire très attention à tous les actes que les uns et les autres posent tout au long de la nouvelle marche du pays.
Et des signes nouveaux apparaissent, plus intrigants…
Depuis quelques jours, revenant aux vieilles amours des régimes militaires, l’on apprend que des journalistes sont interpellés, que souvent certains membres influents du nouveau pouvoir, ainsi qu’on l’a entendu à demi-mots dans les interventions de membres du CNSP à la dernière marche, proféreraient des menaces contre des citoyens dont la parole dérange. Ces signes ne sont pas de nature à rassurer et on comprend depuis des jours que les Nigériens s’interrogent et restent moins enthousiastes. L’interpellation du Directeur d’un quotidien privé du pays et d’un autre journaliste il y a quelques jours est assez troublante en ces moments que traverse le pays. L’on sait que le premier, depuis quelques jours, dans ses parutions a des titres critiques à l’endroit de la gouvernance du CNSP. Peut-on, pour un article qui s’interroge, qui cherche donc à comprendre, s’en prendre à un journal au point de le persécuter ? Comment, dès lors, ne pas lire là un signe inquiétant quant au fait que le CNSP pourrait manquer de réponses aux attentes des Nigériens pour vouloir, par de telles précautions liberticides intimider et étouffer les voix discordantes et souvent bavardes d’un pays qui va mal ? Faut-il croire que la transition a un autre agenda ?
Le CNSP doit donc réfléchir à cette situation qui pourrait l’amener à des extrémismes dangereux pouvant aller à la rupture du lien essentiel avec le peuple. Le Niger a besoin aujourd’hui de maintenir cette complicité intense avec le peuple. Le cas du régime Issoufou est une bonne leçon pour tous. L’homme n’aimait que les éloges, notamment qu’on l’applaudisse, qu’on lé vénère même parce qu’il se croyait incomparable. Il n’acceptait donc pas de critiques qui le visent alors même qu’il ne sait pas faire le bien pour honorer sa robe de président de tous les Nigériens. Il bannissait toute la presse critique à son égard, payait et dorlotait sa presse à gage payée à grands frais mais invendable et sans audience dans le lectorat nigérien car ses éloges mensongers n’intéressaient personne et souvent au sein même de la mouvance au pouvoir. A la fin de son premier mandat, il a fini par comprendre que cette pressemercenaire ne lui a été d’aucune utilité sinon que de l’éloigner des Nigériens, et que d’avoir perdu de l’argent utilisé à payer la médiocrité journalistique. Il était pourtant possible d’aider autrement, notamment en disant à l’autre ce qui ne va pas dans sa gestion. C’est une façon sincère d’aider l’autre à connaitre ses erreurs, à les corriger et à pouvoir répondre aux attentes des populations. Et la conséquence de tout cela est que l’homme, même libéré des charges du pouvoir, est obligé de se cacher derrière les armes, de s’isoler dans une prison à ciel ouvert qu’il s’est créée, demandant une protection. Sans doute sait-il pourquoi tant d’appréhensions l’habitent au point de redouter pour sa sécurité dans un pays où il avait pourtant fait savoir en 2016 qu’il aurait été élu à plus de 90%. Pourquoi, un ancien président peut-il tant avoir besoin d’une garde rapprochée si tant est qu’il a conscience d’avoir gouverné dans la vérité et la justice ? De quoi a-t-il donc si peur pour vivre entouré d’armes ?
On ne peut pas gouverner sans écouter avec bienveillance les critiques qu’on vous fait. Ce n’est pas de la méchanceté. La politique est un jeu complexe où on peut facilement se perdre, les armes ne suffisant pas toujours à s’imposer à un peuple qui pourrait un jour refuser de suivre. Est-ce donc pourquoi la transition semble avoir peur d’aller à un forum national où, justement, il pourrait entendre ces vérités qui fâchent ? Dans ce Niger gravement debout, tous les Nigériens s’intéressent à la chose politique ; ils regardent tout et comprennent tout. On ne peut rien leur cacher ni ruser avec eux. Dans la situation actuelle du pays, on ne peut donc pas ne pas comprendre cela surtout quand, pour s’assurer, face aux différentes menaces intérieures et extérieures, de tenir bien le pouvoir, l’on avait eu besoin de ce soutien du peuple, soutien qu’il peut être fatal de trahir.
Il ne faut donc pas gâcher ce nouvel espoir du peuple nigérien qui a cru à l’action salvatrice du CNSP, et ce depuis que toute l’armée venait soutenir une action isolée qui a fini par déborder des quatre murs de l’intrigue nocturne qui a surpris Bazoum, Dieu, diront certains observateurs, ayant sa main dedans, pour laisser l’action échapper au contrôle de ses instigateurs. Un homme, fut-il un ami ou un parent, ne peut être plus important que le Niger pour sacrifier les chances de relever ce pays qui a tant souffert du larbinisme d’Issoufou envers la France, de ses servilités néocoloniales, de son culte répugnant de la personnalité, de ses légèretés dans la gestion de l’Etat, de son clanisme ordurier qui a ébranlé notre cohésion.
Ce sont des vérités incontestables. Si des gens sont là pour défendre Issoufou, non le Niger ils n’ont qu’à sortir pour le dire aux Nigériens. La vérité est que des malaises sont là ; ils couvent. Il faut donc faire très attention. La France et d’autres partenaires peuvent aussi miser sur de telles situations pour se venger de nous. Ce pays a besoin de rester ensemble. C’est au CNSP de le décider et d’en créer les conditions. Gouverner appelle à des responsabilités énormes pour lesquelles l’on paiera forcément en bien ou en mal. A chacun de faire ses choix. Et la roue tourne…
Source: Nigerdiaspora