Ambassade de la république du Niger au Mali
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L’un
des problèmes du président Bazoum Mohamed est de communiquer mal, et vraiment mal très souvent, oublieux de ce que les mots, en communication, ont un poids, une certaine âme, une ʺfluctuationʺ sémantique qui varie au gré des usages, du contexte de leur emploi. Pour l’homme politique encore, cela est trop vrai car en politique les mots sont chargeables, souvent chargés pour dérouter une communication, et dire totalement le contraire de ce que l’on veut faire entendre. Bazoum, n’en ferait-il qu’à sa tête ou faut-il croire qu’il faut plaindre sa cellule de communication pour ne pas lui éviter tant de bourdes ? On ne rentre pas dans une communication sans au préalable, surtout quand c’est de manière directe où l’on n’a plus de filtre, mesurer ses mots avant de s’y jeter. Devant les caméras des médias internationaux qui donnent trop envie à nos hommes de parler – souvent de spéculer – il y a à faire beaucoup attention. On se détruit aussi par sa propre parole !
Il est vrai que depuis qu’il arrivait au pouvoir, le Président Bazoum, avait su, plus au moins, bien gérer sa parole, sans trop de bourdes, tenant un discours qui blesse peu, totalement à l’antipode de ce dont il en avait l’habitude, peut-être désormais conscient de ses responsabilités de Président de tous les Nigériens à qui il incombe désormais de rassembler les enfants du pays, au-delà de leurs clivages, de leurs opinions qui l’enlèvent rien à la ʺnigériennetéʺ de chacun et surtout en des moments aussi délicats, faits de malaises et de rancoeurs, souvent de rancunes. Mais lorsque, dans sa phraséologie philosophique, porté par ses emphases lyriques, versant dans la logorrhée dithyrambique, le rhétoriqueur parle et reparle, il est incontrôlable, tombant dans l’excès de la démesure philosophe où l’on ne découvre que le même Bazoum que l’on a connu depuis des années et qui, parlant, avait toujours ces débordements qui étonnent avec le leadership qu’il est censé incarner.
Participant à Rome au Forum « Italie-Europe-Afrique : deux continents, un seul destin » qui s’est tenu le 1er décembre 2001, le président de la République du Niger, Bazoum Mohamed, a encore trouvé une tribune pour s’exprimer et dire ce qu’il pense d’un certain nombre de sujets et notamment de la migration. Dans ses propos, appréciant l’implication des Nigériens dans les flux migratoires, il est allé dire des choses qui ont choqué dans son pays, et laissé stupéfaits ceux l’ont écouté à travers le monde. Peut-on dire ce qu’il a dit de son propre peuple ? En effet, on peut entendre le président nigérien dire que « […] les Nigériens ne sont pas candidats au départ des migrants pour l’Europe. […] Les Nigériens ne sont pas assez édifiés, assez éduqués et assez scolarisés pour pouvoir envisager de traverser la Méditerranée pour aller en Europe ». Une telle opinion sur les migrations, en plus d’être déphasée, traduit toute une ignorance du phénomène migratoire aujourd’hui abondamment étudié, analysé, décrypté, expliqué.
Mais avant d’analyser ces propos qui ont fait le buzz sur les réseaux sociaux, évoquons ces voix indiquées que l’on peut entendre ici et là, condamnant des propos qui manquent de finesse autant que de réserve. Quelques Nigériens – et ils sont nombreux – n’ont pas manqué d’exprimer leur stupéfaction face à de tels propos. Alors que certains disent être « anéantis » par les propos outrageants qu’ils ont entendus, d’autres, affligés, se posent des questions quand aux convictions profondes qui peuvent avoir provoqué chez l’auteur de telles analyses presque insultantes à l’endroit du peuple. Par l’opinion que le président-philosophe se fait de la migration en ce qu’elle mobilise des Nigériens, l’on ne peut que se poser des questions. Peut-il vraiment comprendre, celui-là, le fait migratoire, pour avoir à propos de telles opinions déphasées ?
Faut-il croire, par la compréhension philosophique du phénomène à laquelle l’on a eu droit ce 1er octobre à Rome, que pour voyager, il faut avoir un diplôme, avoir été à l’école ? Ne peuvent donc plus voyager, et notamment pour aller en Europe, que ceux qui ont des diplômes, que ceux qui sont allés à l’école, eux seuls ? C’est incroyable !
Parlant du Niger, il faut tout de suite souligner que le pays, comme beaucoup d’autres du continent, a une tradition du voyage et de la migration, avec des populations qui ont depuis de longues années connu des mobilités qui les ont conduites hors des frontières du pays, allant souvent loin, jusqu’aux côtes, rêvant d’ailleurs lointains et merveilleux. Ceux qui inauguraient ces voies du voyage, n’étaient ni érudits, ni lettrés, ni alphabétisés. Ils n’avaient pas connu d’écoles mais ils partaient quand même. Ils aimaient l’aventure. Et cela est simplement humain. Même parmi ceux qui partaient, les premiers vers l’Occident, indépendamment des étudiants, il y avait les non lettrés qui étaient pourtant nombreux.
Peut-il d’ailleurs croire que ceux des autres pays qui partaient, étaient de grands diplômés que ne sauraient être les Nigériens ? Les Nigériens, sont-ils donc les plus abêtis de la terre pour ne pas savoir voyager et ne pas vouloir voyager ? Les diplômes, enseignerait-ils à savoir et aimer voyager ? On le voit, la compréhension philosophique de la migration chez le président nigérien est assez curieuse. Combien de Maliens, de Guinéens, de burkinabés, et d’autres nationalités, sont partis vivre et travailler en Europe, sans jamais avoir été à l’école, sans rien connaitre des lettres de l’alphabet ? La seule vérité que l’on peut lui concéder dans ce qu’il dit est d’affirmer que « les Nigériens ne sont pas candidats au départ des migrants pour l’Europe », restant plus lucides à ne pas partir dans l’illégalité, respectueux des lois, préférant toujours partir dans le respect des lois, de la réglementation en vigueur dans les pays de leurs destinations préférées. S’ils ne partent pas, c’est bien plus pour cette raison que pour une autre, et surtout pas au nom de cette histoire saugrenue qui donne à dormir debout de « diplômes » que les Nigériens de la nullité n’auraient pas, ainsi que s’en plaint celui qui est désormais leur président.
Entre autres propos très graves, c’est de dire que […] Les Nigériens ne sont pas assez édifiés », insinuant alors que les Nigériens sont encore dans les ténèbres quand les autres peuples voyageurs sont dans la lumière, incapables, eux, de comprendre la marche du monde pour aller avec lui dans l’aventure. Un autre qui ne prévaudrait pas de la nationalité du Niger aura tenu de tels propos, on l’aura voué aux gémonies, l’accablant même de racisme, ou en tout cas de discrimination, de manquer de respect pour un peuple digne. On apprend encore, dans ses révélations que les Nigériens ne seraient pas « assez éduqués et assez scolarisés pour pouvoir envisager de traverser la Méditerranée pour aller en Europe » comme si ceux qui partaient le réussissaient par les diplômes, par quelques osmoses de leurs parchemins magiques qui peuvent, seuls, permettre, de traverser les mers. Ils ne sont ni les capitaines des bateaux, ni les pilotes des avions pour exiger chez eux, cette vaste connaissance » sans laquelle il serait impossible de partir.
Cette histoire du président nigérien ne reconnait aucune fierté aux Nigériens. Comment donc, diriger – là est le problème de Bazoum – un peuple qui ne sait rien, parce que peu « instruit », mal « éduqué » ainsi qu’il le proclame à Rome ? Avec un tel discours, est-il possible que Bazoum apaise sa relation avec les Nigériens pour avoir la capacité de les comprendre et marcher – disons « avancer » – avec eux ?
Comprendre un peuple, c’est respecter sa dignité.
Source: Nigerdiaspora du 14 dec 22